lundi 5 mai 2014

Nombres d'oxydation

Cette notion est fondamentale pour pouvoir équilibrer des réactions d'oxydo-réduction. On rappelle ici une méthode simple et fiable pour accéder à ces nombres d'oxydation moyennant l'écriture d'une structure de Lewis:

1. Dessiner une structure de Lewis du composé ou de l'ion montrant toutes les paires liantes ou non liantes. Quand des formes résonnantes existent, une seule structure suffit.

2. Pour chaque paire liante A-B et si B est plus électronégatif que A, briser la liaison A-B en affectant les deux électrons à B. Si A et B possèdent la même électronégativité, donner un électron à A et un électron à B. Chaque atome garde en propre sa ou ses paires non-liantes.

3. Une fois que toutes les liaisons ont été brisées, soustraire le nombre d'électrons présent autour de chaque atome du nombre d''électrons de valence de l''atome libre. La différence est le nombre d'oxydation cherché.

Pour mémoire l'électronégativité EN est un nombre compris entre 1 et 4 que l''on obtient en utilisant les règles suivantes:

Élément 1s: H = 2,1\nAlcalins (2s, 3s, 4s, 5s, 6s): Li, Na, K, Rb, Cs = 1,0
Éléments (2s, 2p) : ajouter 0,5 à partir de Li: Be = 1,5 B = 2,0 C = 2,5 N = 3,0 O = 3,5 F = 4,0
Éléments (3s, 3p) : ajouter 0,3 à partir de Na: Mg = 1,3 Al = 1,6 Si = 1,9 P = 2,2 S = 2,5 Cl = 2,8
Éléments (4s, 4p) : ajouter 0,25 à partir de K: Ca = 1,25 Ga = 1,5 Ge = 1,75 As = 2,0 Se = 2,25 Br = 2,5
Éléments (5-6s, 5-6p) : ajouter 0,2 à partir de (Rb,Cs): (Sr,Ba) = 1,2 (In,Tl) = 1,4 (Sn,Pb) = 1,6 (Sb,Bi) = 1,8 (Te,Po) = 2,0 (I,At) = 2,2
Éléments d = 1,2 à 1,9
Éléments f = 1,2
Voici une application de la méthode à la nitroguanidine:


Pour les liaisons N-H, c'est l'azote qui prend les 2 électrons puisque EN(N) = 3,0 > EN(H) = 2,1
Pour les liaisons C-N, c'est l'azote qui prend encore les 2 électrons puisque EN(N) = 3,0 > EN(C) = 2,5
Pour les liaisons N-O, c'est l''oxygène qui prend les 2 électrons puisque EN(O) = 3,5 > EN(N) = 3,0
Pour la liaison N-N, chaque atome d''azote prend 1 électron car il y a égalité.

Une fois que l'on a attribué les électrons (formule de droite), il ne reste plus qu'à compter le nombre d'électrons autour de chaque atome en utilisant le fait que l'atome d''hydrogène non lié possède 1 électron de valence, le carbone 4, l'azote 5 et l''oxygène 6. Par convention on utilise des chiffres romains:

Ox(H) = 1 - 0 = +I
Ox(C) = 4 - 0 = +IV
Ox(O) = 6 - 8 = -II
Ox(N1, N2) = 5 - 8 = -III
Ox(N3) = 5 - 7 = -II
Ox(N4) = 5 - 1 = +IV

On voit donc que l'azote existe sous trois états d'oxydation différents dans cette molécule. La méthode est générale pour toute espèce moléculaire où l'on peut écrire une structure de Lewis. Pour les espèces non-moléculaires, c'est à dire solides, on joue sur le fait que les atomes de fluor, de chlore, de brome et d'iode possèdent le degré d'oxydation -I tandis que les atomes de lithium, sodium, potassium, rubidium et césium possèdent le degré d'oxydation de +I.  Les atomes d'oxygène, de soufre et de sélénium possèdent le degré d'oxydation -II sauf s'ils sont liés à eux-mêmes auquel cas ils possèdent le degré d'oxydation -I. Les atomes de béryllium, magnésium, calcium, strontium et baryum ont pour leur part un degré d'oxydation de +II à l'état solide. Enfin pour l'atome d'hydrogène il possède un degré d'oxydation de +I sauf s'il est lié à un métal auquel cas son degré d'oxydation est -I. Moyennant ces règles, on joue sur le fait que la somme de tous les degrés d'oxydation doit toujours être nulle pour tout solide, ce qui permet de déduire le nombre d'oxydation d'un atome métallique qui n'est pas un élément alcalin ou alcino-terreux.

Considérons à titre d'exemple deux sels de bore de formule NaHB2O4 et NaH2BO4. Pour le premier on a Ox(Na) = Ox(H) = +I et Ox(O) = -II, soit 1 + 1 + 2·Ox(B) - 4x2 = 0, soit Ox(B) = 6/2 = +III, nombre d'oxydation parfaitement normal pour l'atome de bore qui possède 3 électrons de valence. Si l'on applique les mêmes règles au deuxième solide, il vient 1 + 2x1 + Ox(B) - 4x2 = 0, soit Ox(B) = +V, ce impliquerait la perte des 2 électrons de l'orbitale 1s de cœur. Dans ce cas, il est plus raisonnable de penser à un peroxyde où l'oxygène se trouve lié à lui-même, auquel cas Ox(O) = -I au lieu -II. Avec cette nouvelle hypothèse, il vient: 1 + 2x1 + Ox(B) - 4x1 = 0, soit Ox(B) = +I, ce qui est de nouveau peu probable au vu de la faible électronégativité de l'atome de bore par rapport à l'atome d'oxygène. La solution vient en considérant que deux atomes d'oxygène ont un nombre d'oxydation de -II, les deux autres ayant un nombre d 'oxydation de -I, soit: 1 + 2x1 + Ox(B) - 2x2 -2x1 = 0, soit Ox(B) = +III, ce qui est satisfaisant. Parfois, ce sont les métaux qui peuvent avoir deux degrés d'oxydation différents dans la même structure. Ainsi pour la magnétite de formule Fe3O4, on aurait avec Ox(O) = -II, Ox(Fe) = 8/3 et avec Ox(O) = -I, Ox(Fe) = 4/3, ce qui n'est pas satisfaisant. L'ion peroxyde étant formé de deux atomes d'oxygène chimiquement liés l'un à l'autre [O-O]2- il est impossible ici que les atomes de fer aient tous le même degré d'oxydation. Si en revanche l'on suppose qu'un atome de fer est au degré d'oxydation +II et les deux autres au degré d'oxydation +III, il vient: 2 + 3x2 + 4·Ox(O) = 0, soit Ox(O) = -8/4 = -II et tout rentre dans l'ordre.

Enfin pour les espèces moléculaires contenant des métaux de transition M, appelés complexes de coordination, il faut classer les ligands selon le nombre d'électrons qu'ils peuvent fournir lors de la liaison avec l'atome métallique central:

Ligand radicalaire simple (1e-) =  X (H, R, Ph, F, Cl, Br, I, OR, NR2, PR2, NO, σ-allyl,...)
Ligand neutre (2e-) = L (:CO, :NR3, :PR3, alcènes, :CR2, alcynes, liaison M-M,...)
Ligand biradicalaire (2e-) = X2 (=CR2, =O, =NR, =PR, peroxydes,...)
Ligand radicalaire (3e-) = LX (π-ényl,  ≡CR, =NO, CO2R, O2CNR2,...)
Ligand neutre (4e-) = L2 (dioléfines, diphosphines, diamines, diarsines, alcynes, dialcoxyalcanes, liaison M=M,...)
Ligand mixte (4e-) = LX2 (:O=, RN:=, RP:=,...)
Ligand radicalaire (5e-) = L2X (Cp, diényl, phospholyl = C4H4P,...)
Ligand radicalaire (5e-) = LX3 (≡N:,...)
Ligand neutre (6e-) = L3 (benzène, trioléfines, triamines, triphopshines, pyridine, C5H5P, liaison M≡M,...)
Ligand mixte (6e-) = L2X2 (pôrphirines, phtalocyanines,...)
Ligand radicalaire (7e-) = L3X (cycloheptatriényl,...)
Ligand neutre (8e-) = L4 (cyclo-octatétraène = COT), liaison quadruple M-M)

Ce classement préalable ayant été effectué, le complexe peut s'écrire: [MLnXm]Q± ce qui permet de trouver le degré d'oxydation du métal M: Ox(M) = m + Q. Voici un exemple de cette méthode appliquée à un complexe polynucléaire du molybdène de charge nulle (Q = 0) impliquant deux ligands cyclopentadiényl (Cp) autour d'une liaison triple métal-métal:



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